Les vignettes d’Aéla – Des outils pour vivre ensemble
La communication dans les colocations,
ce n’est pas un long fleuve tranquille et pourtant c’est la clé de bonnes relations.
C’est pourquoi, avec l’équipe de psychologues LOKI ORA, nous nous sommes penchés sur la question et avons eu envie de monter un projet autour de la formalisation de concepts parfois flous afin d’aider les colocataires à mieux se comprendre…
Nous profitons de cette nouvelle newsletter pour mettre en avant ce projet qui a débuté l’année dernière : la rédaction des « vignettes d’Aéla» !
L’idée est de vulgariser sous forme de courtes fiches des concepts régulièrement abordés dans le cadre de nos ateliers découverte et/ou des sujets clés de la vie en colocation. Cela permet aux participant.e.s des ateliers, ainsi qu’à nos colocataires de pouvoir s’y référer au besoin.
Nous vous partageons et vous laissons découvrir les deux premières vignettes sur les stéréotypes et les préjugés d’une part, et sur l’assertivité d’autre part.
Stéréotypes et préjugés :
Quelques mots d’introduction avant de vous définir les concepts de stéréotype et le préjugé !
Au quotidien, nous sommes confrontés à de nombreuses informations. Le cerveau ne peut pas toutes les traiter, ce serait trop coûteux en termes d’énergie, et il a notamment recours à la catégorisation pour les simplifier, les classer et les organiser. Lorsque ces informations concernent des personnes, il s’agit de la catégorisation sociale. Autrement dit, le cerveau place les personnes dans des catégories selon des caractéristiques perçues (ex. le genre, l’âge, la religion, le physique).
Le stéréotype est un ensemble de croyances concernant les caractéristiques d’un groupe social ; des idées rigides attachées à une catégorie, qui sont socialement partagées (volet cognitif). Il simplifie la réalité et associe la catégorie dans laquelle il a placé l’individu avec des traits associés aux membres de celle-ci (ex. catégorie « senior au travail » -> il.elle va manquer de dynamisme et manquer d’adaptation face au changement).
Le préjugé est une réaction émotionnelle, une attitude envers un individu sur base du sentiment que l’on éprouve à l’égard du groupe auquel il appartient (évaluation +/-).
Les stéréotypes et les préjugés peuvent mener à de la discrimination (volet comportemental), c’est-à-dire le traitement inégal d’un individu en raison de son groupe d’appartenance (ex. racisme, sexisme, homophobie, âgisme, transphobie, etc.).
OK, je vois… Mais quel rapport avec le parcours de la colocation ?
Les seniors qui entrent dans la démarche du parcours de la colocation Loki Ora ne se connaissent pas. De fait, ils vont avoir recours à la catégorisation sociale. Imaginez, Martine entre dans la pièce (nous rencontrons vraiment beaucoup de Martine !), vous ne la connaissez pas. Vous allez l’observer, elle a du charisme, elle porte des lunettes et des vêtements chics, elle a une coiffure impeccable, et un joli rouge à lèvre illumine son visage. Vous allez probablement la placer dans différentes catégories sociales telles que bourgeoise, sûre d’elle, intelligente, etc. Cette perception sociale orientera la façon dont vous allez vous adresser à Martine (ou au contraire ne pas lui parler ?). Vous allez par exemple peut-être être intimidé, faire attention à la façon dont vous parlez, etc.
Par ailleurs, lors des ateliers « Découverte de la colocation », nous abordons des thématiques de la vie quotidienne, et par exemple, j’entends régulièrement des stéréotypes et des préjugés en lien avec les régimes alimentaires. Une illustration récurrente concerne les personnes végétariennes ou vegan : » Les personnes qui ne mangent pas de viande nous critiquent et veulent nous imposer leur façon de manger, je n’aime pas ça, je n’aimerais pas habiter avec ces personnes ». Est-ce une affirmation juste ? Est-ce que Martine (décidément) qui est assise à côté de vous va vous critiquer et essayer de vous convaincre des bienfaits du végétarisme ce midi ? Ou va t-elle déjeuner sans se préoccuper de votre assiette ?
Quelques pistes pour les déconstruire
Reprenons l’exemple de Martine qui est végétarienne… Participer à l’atelier avec elle, apprendre à la connaitre individuellement (sessions d’atelier en petit groupe, entre 4 et 8 participant.e.s) va contribuer à la déconstruction de ces croyances sur les régimes alimentaires différents du sien (vous verrez qu’elle ne correspond pas à ce stéréotype et qu’elle n’essayera pas de vous convertir pendant la pause dej’). C’est ce qu’on appelle l’hypothèse de contact : mettre en lien et favoriser les interactions entre des personnes de groupe d’appartenance différent (ici Martine, végétarienne, et vous, omnivore).
Cela paraît simple, mais nécessite certaines conditions
1) Avoir un but commun, dans un cadre de coopération (ici, ce serait de découvrir et se positionner vis-à-vis de la colocation entre seniors, et ce, via des exercices de groupe).
2) Un statut plutôt égal (ici, les seniors sont à la retraite et découvrent ensemble ce que signifie vivre en colocation).
3) Le soutien de l’institution, de l’autorité présente en faveur de l’égalité entre les différents groupes (je pose le cadre au début de chaque atelier : pas de jugement des uns et des autres, respect des avis et des modes de vie, etc.).
4) Le souhait de rencontrer des personnes différentes de soi et une certaine tolérance Comme toute théorie… elle n’est pas parfaite ! Répéter des contacts avec des personnes pour lesquelles nous avons des stéréotypes – même avec une attention minutieuse portée aux conditions de la rencontre – ne suffit pas toujours pour réduire ces stéréotypes et préjugés et adopter une attitude positive envers celles-ci. D’autres facteurs sont à prendre en compte : par exemple, même si une relation positive est développée avec Martine, elle peut être perçue comme une « exception » dans son groupe « végétarien ».
Bibliographie
Ashmore, R. D., & Del Boca, F. K. (1981). Conceptual approaches to stereotypes and stereotyping. Fiske, S. (2008). Psychologie sociale. De Boeck Supérieur.
Gaubert, C. (2019). Rôles des jugements de compétence et d’assertivité dans la justification de la hiérarchie sociale (Doctoral dissertation, Université de Strasbourg).
Légal, J. & Delouvée, S. (2021). Chapitre 1. Définitions, exemples et mesures des stéréotypes et des préjugés. Dans : , J. Légal & S. Delouvée (Dir), Stéréotypes, préjugés et discriminations (pp. 11-33). Paris: Dunod.
Rosenbaum, A. (2023). 50 fiches pour comprendre la psychologie sociale. Bréal
L’assertivité :
L’assertivité correspond à la capacité à s’affirmer, à exprimer sa personnalité et son point de vue tout en respectant celui des autres, sans chercher à l’imposer (≠ fuite, agressivité, manipulation).
Pour ce faire, il est indispensable de mobiliser l’écoute, l’affirmation de soi, le respect d’autrui, ou encore la maîtrise de ses émotions. Par ailleurs, adopter une posture assertive, c’est savoir identifier et écouter ses émotions et besoins, savoir dire « non » sereinement. Imaginez, vous ne serez pas toujours d’accord avec vos colocataires. Vous n’aurez peut-être pas envie de participer à cette soirée jeux de société ce soir, il est important que vous puissiez exprimer votre avis et prendre une décision en accord avec vous-même.
Bien évidemment, nous ne pouvons pas faire preuve d’assertivité 24h/24, et selon les situations, il peut être préférable d’adopter une autre posture !
Comment développer son assertivité ?
Comme le dit Socrate, « Connais-toi toi-même »…
- dans une démarche d’introspection et d’autoperception : être attentif et observer ses propres comportements, son mode de fonctionnement, être à l’écoute et identifier ses émotions, ses besoins, ses limites, etc.
- S’intéresser à l’image que l’on renvoie – et au décalage entre celle-ci et l’image qu’on a de soi-même. Vous pouvez demander à votre entourage comment il vous perçoit : quels sont les traits de caractères qui vous définissent, quel est votre rapport à l’autre, quels sont vos points d’amélioration, etc.
- S’appuyer sur les techniques de la Communication Non Violente (CNV) : Observation des faits > Emotions et sentiments ressentis > Besoin(s) en jeu > Demande à formuler « Si je dis non, je dis oui à quoi ? » : Si je dis « non » à cette soirée jeux de société, je dis « oui » à mon besoin de repos et de solitude par exemple Parler de soi : utiliser le « je » pour s’exprimer
- S’entraîner à l’écoute active : poser des questions, accompagner la personne à élaborer sa réponse, reformuler les propos
Bibliographie
Chalvin, D. (1995). L’affirmation de soi. Paris, ESF.
Fiske, S. (2008). Psychologie sociale. De Boeck Supérieur. https://www.welcometothejungle.com/fr/articles/definition avantages-inconvenients-assertivite
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